Vous êtes dessinateur de manga mais aussi réalisateur. Nous ne connaissons pas vos oeuvres filmées en France, est-ce du cinéma ou du "direct to video" ?
Normalement, un de mes films a été projeté en France, Rampo noir [1], une compilation de quatre sketches de quatre réalisateurs travaillant sur une adaptation d’Edogawa Rampo [2].
Il s’agit d’histoires de détectives ?
Des histoires bizarres surtout.
L’esthétique de Bambi est proche de la Pop et des comics américains underground des années 70. Quelles sont vos inspirations graphiques ?
J’aime beaucoup le "punk rock". J’ai donc beaucoup eu l’occasion de voir des pochettes d’album, flyers, illustrations. J’ai été influencé par des gens comme Robert Williams du Lowbrow Art.
On pense tout de suite, en lisant Bambi, à un film comme Tueurs nés d’Oliver Stone. Quelles sont vos références en tant que dessinateur de BD, et en tant que réalisateur de cinéma ?
J’ai les mêmes références pour mes BD et pour mes films. Je m’intéresse à la structure originelle d’histoires que personne n’a encore imaginées.
Vous sentez-vous plus libre en tant que dessinateur ou en tant que réalisateur ?
Dans mes dessins, je suis totalement libre, car personne ne peut m’embêter. Par contre, le cinéma exige de travailler en équipe, ce qui restreint la liberté. De plus, dans mes mangas, je tente des choses impossibles dans mes films. Par exemple, dans Bambi, j’ai utilisé des cadrages impossibles à réaliser au cinéma.
Pourriez-vous décrire la revue dans laquelle est sortie Bambi, et quel est le type de lecteur ?
Le magazine s’appelle Comic Beam, il est underground, sans mettre en avant le côté alternatif. Le ton y est plutôt libre et un peu bête. Les lecteurs sont des amateurs de mangas étranges. Je dois avouer que dans ce magazine, mes oeuvres n’ont pas beaucoup de succès.
Bambi a un esprit très underground. Un genre qui marie souvent sexe et violence. Curieusement, chez vous, nous n’avons pratiquement que de la violence, mais pas beaucoup de sexe.
Vers la fin de l’histoire, il y a trois tueuses SM. Par contre, Bambi est un être pur dans un monde sale, c’est pourquoi je n’ai pas souhaité développer son côté sexuel.
Préférez-vous la Bambi qui porte un flingue ou celle qui regarde des émissions pour enfants ?
J’aime ses deux côtés. Bambi ne prend pas trop de plaisir en flinguant. Pour elle, il n’y a pas d’autre choix, c’est comme si elle chassait des moustiques. (rires)
Comment conciliez-vous votre travail de mangaka et de réalisateur ? Dessinez-vous des planches pendant les temps morts de vos productions, ou vous consacrez-vous à un seul projet à la fois ?
A la base, je me considère comme un auteur de manga. Si j’ai commencé à filmer, c’est surtout parce que l’occasion s’est présentée.
Etes-vous tenté par le cinéma d’animation ?
Je suis allergique à l’animation japonaise ! Elle ne m’intéresse pas du tout.
C’est parce que ce sont toujours les mêmes codes graphiques ? Voudriez-vous alors travailler avec des producteurs étrangers ?
Je déteste l’animation japonaise car c’est un monde fermé, cela ne s’adresse qu’aux amateurs du genre. Je suis aussi gêné par le graphisme et les jeux d’acteurs des personnages. Je les trouve grotesques. Par contre, si je rencontre des artistes travaillant plus librement, je serais prêt à travailler avec eux.
Que pensez-vous d’un réalisateur comme Takashi Miike [3], dont l’univers est semblable au vôtre ?
C’est un trésor national ! (rires)
Quels sont vos projets ?
Je travaille sur Soil, une série totalement différente de l’univers de Bambi. Je prépare également un long métrage.
(par Xavier Mouton-Dubosc)
(par Thomas Berthelon)
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En médaillon : Atsushi Kaneko. Photo (c) Thomas Berthelon
Lire la chronique du T.1 de "Bambi"
Cette interview a été diffusée dans l’émission radio "Supplément week-end" du samedi 7 avril 2007
[1] Film à sketches réalisé en 2006, autour de l’acteur Tadanobu Asano
[2] Écrivain japonais de romans glauques dont le nom fait référence à celui d’Edgar Allan Poe
[3] Réalisateur japonais de films déjantés comme la trilogie Dead or Alive, Gozu, ou Audition.
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