Quel est votre parcours ?
J’ai fait les beaux-arts d’Angoulême puis j’ai travaillé dans l’animation. Mon idée première était de devenir scénariste, malgré ma formation aux beaux-arts. Ether Glister [1], mon premier album scénarisé fut dessiné par Yoann et le deuxième par Thierry Leprévost. Puis j’ai dessiné un album jeunesse Madame La Lune [2] sur un scénario de Jean-Luc Loyer. Et enfin, j’ai adapté seule un roman médiéval, Le bel inconnu, en deux tomes chez Carabas.
Quelle est l’origine des Lettres d’Agathe ?
Au départ, j’avais commencé par écrire un roman. Et puis, petit à petit, des images sont venues. D’abord un portrait, puis des regards, des visages, des petits bouts de scène. Le dessin a absorbé peu à peu le texte déjà écrit.
Ce récit est-il autobiographique ?
Pas vraiment. J’ai emprunté un bout de l’histoire d’une personne : celle d’une enfant non désirée, née après guerre, celle des premières familles recomposées des années 50. J’avais entendu cette histoire de mère qui n’aimait pas son enfant quand j’avais 18-20 ans et cela m’avait beaucoup marquée. J’étais étonnée, moi qui vivait une enfance assez choyée. Ce qui m’avait surpris, c’était que cette femme gardait pour sa mère une certaine admiration. D’autre part, il y a une dizaine d’années, j’ai travaillé un moment avec des enfants dont la garde avait été retirée à leurs parents. J’ai été frappée par le mélange de violence et d’affection désespérée. C’était assez paradoxal. Lettres d’Agathe s’est construit à partir de ces différentes expériences et des petits témoignages écoutés au détour de conversations sur les relations mère-fille. Il a juste fallu que je m’approprie l’histoire, un peu comme le ferait un acteur.
La première partie du livre est très racontée et la seconde très dialoguée. Pourquoi ?
Un des premiers éditeurs rencontrés m’avait dit que ça ne l’intéressait pas car ce n’était pas de la bande dessinée. Il considérait qu’à un certain âge, il fallait savoir choisir entre l’illustration pour enfants et la bande dessinée ! J’ai travaillé à l’instinct. Après avoir raconté l’enfance, il m’a semblé naturel dialoguer davantage la partie contemporaine des années 80. Cela allégeait aussi le récit.
Votre ouvrage a une tonalité graphique particulière. Comment avez-vous fait ?
C’est du lavis [3] travaillé sur Photoshop. C’est la première fois que j’utilisais cette technique car habituellement, je travaille à la plume. Pour ce livre, j’avais besoin d’émotion et je trouvais que le pinceau avait un meilleur rendu de ce point de vue-là.
Quels sont vos prochains projets ?
Je vais peut-être participer à un collectif chez Delcourt. Et j’ai aussi un projet de livre basé sur un fait-divers des années 80 où une jeune fille tourne mal. Un sujet, encore une fois pas très gai !
(par Laurent Boileau)
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Photo © L. Boileau
Illustrations © Delcourt/Ferlut
[1] Ed. Delcourt
[2] Ed. Delcourt
[3] Le lavis est une technique de peinture consistant à n’utiliser qu’une seule couleur (à l’aquarelle ou à l’encre de Chine) qui sera diluée pour obtenir différentes intensités de couleur.