Alors même que l’automne apporte son lot d’albums au succès annoncé avant même leur parution (au hasard : Astérix, Blake et Mortimer, Blacksad et autre Petit Spirou), il serait des plus regrettables de passer à côté de ces Coeurs de Ferraille.
Sud des Etats-Unis, dans un XIXème siècle uchronique.
L’album débute par des planches en noir et blanc, flash-back où Eva attend avec sa mère dans leur maison. Elle se cache pour faire une surprise à son père.
Puis le récit passe en couleurs et Eva, devenue une jeune vagabonde en fuite, accompagnée de son chien Jesper, mène une vie de liberté, de solitude et de chapardage.
Un jour, elle a la bonne surprise de trouver un livre qui va bouleverser son âme. Mais aussi bouleverser sa vie. Car ce livre écrit par Weldon, pourrait bien remettre en cause l’ordre du monde et les croyances établies.
Aussi, Halfa, un riche suprémaciste, charge deux robots Limiers de retrouver les exemplaires de ce livre et d’assassiner son auteur.
Eva va donc devoir fuir les Limiers, qu’elle ne connaît malheureusement que trop bien…
Ce deuxième tome confirme le premier. Les thématiques des relations entre les hommes et les robots, des totalitarismes, du libre arbitre et de l’art sont abondamment abordées par les séries et le cinéma (Reals humans ou Blade Runner par exemples) et par la littérature (Klara et le Soleil, roman époustouflant de Kazuo Ishiguro dans lequel des AI robots servent de nounou et de jouet à des adolescents).
Le pari de Munuera et Beka (et Sedyas aux couleurs) est de s’inscrire dans la lignée d’oeuvres marquantes sur la nature humaine, le rapport de l’humanité à son environnement, la création artistique, la ségrégation, tout en optant pour un traitement émotionnel et de mise à distance (via l’ironie) invitant à la réflexion.
Tout ou presque est réussi dans cet album : la couverture ; l’histoire aux nombreux rebondissements mais avec toujours ce fil conducteur de la fuite d’Eva et de celle de Weldon qui vont se rejoindre ; le dessin rond et les couleurs vives qui viennent contrebalancer la noirceur du récit même si l’espoir malgré tout (comme dirait un groom rajeuni et revisité) résiste ; les références historiques et actuelles ("le grand remplacement n’aura jamais lieu", "races inférieures"). C’est aussi une belle réflexion sur l’inspiration et l’art.
"Parce que tu es seule. Parce que tu ne pourras pas passer ta vie à fuir. Parce que le monde ne te fera aucun cadeau, et parce qu’on est plus forts à deux que tout seul."
"Un livre qui n’est pas lu, c’est un livre qui n’existe pas....mais un livre qui est lu, c’est une voix qui ne s’éteint pas...qui vit pour toujours"
"Le partage et l’entraide nous aident à voir la beauté du monde".
(par Christian GRANGE)
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