Il se fait que j’ai bien connu Bob, son père, un grand type mince à la moustache facétieuse, élégant et plein d’humour. Alors que je m’étonnais qu’avec son talent, il avait jugé nécessaire pour l’essentiel de sa carrière de se mettre dans l’ombre d’un grand homme, Hergé, il m’avait répondu avec ce proverbe flamand : « - Reste à ta place, c’est déjà assez prétentieux comme cela. »
Interview : Didier Pasamonik - Réalisation : Thelma Susbielle.
On retrouve la modestie du père chez le fils. Il aurait pu reprendre les séries de son père, Cori le Moussaillon ou Barelli, qui avaient un certain succès. Ou persister dans les aventures de La Vache qu’il anima dans les années 1980 dans (A Suivre) ou Gaspard de la Nuit, déjà en complicité avec Stephen Desberg, un camarade de collège. Mais la vie a suivi d’autres chemins de traverse et cela ne l’a pas perturbé plus que cela : il met autant de soin à fignoler ses dessins d’humour et ses planches que d’attention pour ses élèves de la classe de bande dessinée de Sint-Lukas à Bruxelles.
C’est avec pédagogie d’ailleurs que, dans cette interview, il parle de dessin, de composition, de narration avec une étonnante pertinence. Et c’est avec beaucoup d’humour et d’érudition qu’il évoque son père Bob De Moor, Hergé avec qui il a travaillé, son parrain Willy Vandersteen et d’une manière générale l’âge d’or de la BD belge.
Dessins d’humeur
L’actualité de Johan De Moor, ce sont deux albums. Dessins d’humeur (Casterman) où il compile des dessins d’actualité faits pour divers journaux belges, d’où certaines notations typiquement bruxelloises (on y retrouve par exemple le « brol » hergéen). Les sujets sont Charlie Hebdo, Donald Trump, la Syrie, le Brexit, l’immigration, la société de consommation, l’affaire Weinstein, la crise climatique, le complotisme, les réseaux sociaux, le confinement au temps du Covid-19, les GAFA, et puis l’art, déconstruit avec impertinence.
Dans la ménagerie de Led Zeppelin
Autre ambiance avec Les Sauvages Animaux (Casterman). Il s’agit d’un groupe tellement mythique qu’il est à l’origine du pseudo de l’un de nos meilleurs auteurs contemporains, Zep. Il n’a pas marqué que le dessinateur suisse. Stephen Desberg -dont il faut se rappeler qu’il a fait carrière dans la chanson au début des années 1980 en solo et dans un groupe The Bad Sneakers- a été durablement marqué par le groupe londonien.
Mais la volonté des auteurs n’était pas de faire un documentaire sur l’un des groupes de rock les plus importants de l’histoire. D’où l’animalisation : Peter Grant est un ours-manager, Robert Plant un lion-chanteur et Jimmy page un loup-guitariste. « Ma démarche, dit Johan De Moor, c’était de retrouver le parfum de l’époque. Et de la rappeler par petites touches… »
Et c’est plutôt réussi. Cela donne une bande dessinée drôle, d’une belle énergie, dans une Ligne claire, un peu à l’exemple de celle d’Émile Bravo, pétrie d’universel.
(par Didier Pasamonik (L’Agence BD))
(par Thelma SUSBIELLE)
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© Casterman pour les illustrations. Photo : Thelma Susbielle.
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