Vous semblez, dans Plunk, développer un humour absurde.
Letzer : L’absurde fait partie de nos gènes. Nous sommes Luc Cromheecke et moi-même, de grands amateurs d’humour absurde. J’ai été nourri au biberon avec les Monty Python, et d’une manière plus générale de cinéma et d’art pictural décalé. J’avais envie de réaliser une bande dessinée surréaliste et absurde.
Tout est non-sens dans votre série
L : Le non-sens a du sens ! On aime prendre les sens uniques de temps en temps. Notre société entraîne tellement d’obligations que nous avons tous envie de nous démarquer de temps en temps, de faire le contraire de ce que l’on attend de nous.
Vous travaillez ensemble depuis de nombreuses années. Les lecteurs de Spirou se souviennent de Tom Carbone qui a été publié dans ce journal à partir de 1985
Cromheecke : Nous nous sommes rencontrés au début des années ’80 à l’Académie des Beaux-Arts d’Anvers. Nous avons commencé à collaborer ensemble à ce moment là. Nous avons rapidement proposé différentes histoires à Dupuis, dont Tom Carbone
L : Nous sommes un vieux tandem, issus de la même génération. Nous avons forcément les mêmes goûts, les mêmes idoles. Nous nous comprenons sans échanger trop de mots…
Plunk est une BD muette. Pourquoi ? Est-ce une volonté pour séduire un public international, pour vendre des millions d’albums ?
L : C’est le fruit du hasard. D’ailleurs "Plunk" est une onomatopée en soi ! Ce nom réfère au bruit d’une goutte d’eau tombée du plafond sur la planche du dessinateur qui donne vie à ce personnage. Cet auteur était pauvre et on voit, au fur et à mesure que nous le mettons en scène, qu’il devient de plus en plus riche. Il a réussi à faire de la BD sans dépenser une phrase !
C : Plunk est aussi une synthèse de la vulgarité en bande dessinée : l’auteur est un vrai looser qui n’a pas beaucoup de talent : il dessine vulgairement. Ses couleurs sont pires encore : criantes…
Je me souviens avoir vu le Plunk dans les cimaises du Centre Belge de la BD bien avant la publication des planches dans Spirou…
L : Le CBBD nous avait demandé d’inventer un personnage qui synthétiserait les autres héros de BD : Garfield, Snoopy, les Schtroumpfs, etc. Nous les avons mis dans un shaker et il en est ressorti le Plunk..
C : Et en plus, Il est aussi reconnaissable que Bob L’Eponge. Si vous le voyez à cinq cent mètres, vous vous direz : « Ah ! C’est le Plunk ».
Aimeriez-vous qu’il y ait une « plunkmania » ?
L : On l’espère ! Nous avons une politique de guérilla, on colle des autocollants représentant le Plunk dans différents endroits. Cela marche d’ailleurs : un taggeur renommé a repris notre personnage sur une fresque. Nous en parlons sur notre blog.
Votre humour est-il 100% belge ?
L : Non. Il peut être lu par les Français. Heureusement que Philippe Geluck les a initiés à l’humour absurde. Ils commencent à apprécier de mieux en mieux ce genre…
C : L’éditeur est content. Nous lui avons épargné des frais de traduction. Plunk est une BD sans paroles ! Même le titre de l’album, « 100% Pure Plunk », est lisible par les Néerlandophones…
"Plunk" peut-il être lu et apprécié par les enfants ?
C : Oui. En le créant, on se demandait qui serait intéressé par ce personnage. Plunk contient différents types d’humour. Il peut être lu par les intellectuels comme par les enfants !
(par Nicolas Anspach)
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Photo en médaillon : (c) Nicolas Anspach
Illustrations (c) Cromheecke, Letzer & Dupuis.
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